Descriptif
Anthropologie
Ce séminaire est une introduction à l’anthropologie sociale autrement dit à l’étude comparative des sociétés humaines. La connaissance de sociétés différentes et la prise en compte de points de vues « autres » s’appuie sur des faits monographiques tirés d’enquêtes de terrain où le chercheur, s’immerge dans une autre société pour étudier des façons de vivre et de penser différentes des siennes. Ces données sont la base de la comparaison entre les formes de vie sociale. Elle permet de saisir l’unité du genre humain à travers ses manifestations les plus diverses et de mettre en perspective certaines de nos conceptions de la raison, du pouvoir, de l’organisation sociale, de la parenté, de la richesse, etc.
Chaque séance est organisée autour d’un thème qui est articulé autour d’une étude de cas, consacrée à une société particulière.
(1) Introduction Nous et les autres. Quelles sont les conditions scientifiques, et non simplement morales, d’un véritable respect de l’autre ? L’anthropologie sociale est née de la difficulté d’appliquer sérieusement la théorie de l’évolution aux cultures humaines en les classant des plus primitives aux plus évoluées (c’est-à-dire les Occidentaux). Cette rupture a été rendue possible en particulier grâce à la pratique de l’enquête de terrain qui consiste pour le chercheur à vivre avec les personnes observées et apprendre à participer à leur vie sociale. L’anthropologie a été, et reste, pourtant dans un dialogue interminable avec l’évolutionnisme qui structure les deux axes de la discipline : d’une part l’unité du genre humain et de l’autre sa singularité : la différence des cultures. Cette problématique sans cesse reformulée. À présent, on reconnaît de plus en plus des formes de cultures à d’autres espèces que l’être humain et la différence entre les cultures est de moins en moins évidente à comprendre dans le monde contemporain globalisé où elle a cessé d’être un moyen de mise en ordre (les Bororo ici, les Berbères là bas, les Maoris ailleurs, etc.).
Claude Lévi-Strauss 1987, Race et histoire, Paris : Folio Essais (1ère édition 1952)
(2) Rationalité, croyance et sorcellerie. La seconde séance portera sur l’étude de la magie, de la sorcellerie, etc. qui a permis de basculer de la spéculation philosophique à l’anthropologie sociale. Nous aborderons la question à partir des travaux sur la sorcellerie en Afrique. La séance se terminera par une discussion de la notion de croyance et des travaux contemporains sur les fantômes.
Evans-Pritchard. E. E., 1972, Sorcellerie, oracles et magie chez les Azandé. Paris, Gallimard (Witchcraft, Oracles, and Magic Among the Azande. Oxford: The Clarendon Press, 1937)
Delaplace Grégory, 2018 « Les fantômes sont des choses qui arrivent », Terrain, 69 : 4-23.
(3) Religion, rituel et société. Cette séance présentera les fondements de l’anthropologie des religions et la manière dont les anthropologues ont essayé de rendre compte des cosmologies dans la structuration de l’ordre social. L’étude de cas sera l’analyse par Émile Durkheim du totémisme en Australie et les conclusions anthropologiques qu’il en tire sur les représentations collectives dans les sociétés humaines. Nous verrons ensuite comment de l’étude des rituels s’est développée comme des branches les plus riches de la discipline pour montrer, enfin, que la sphère rituelle reste fondamentale dans de nombreuses sociétés du monde contemporain.
Durkheim Émile, 1994, Les formes élémentaires de la vie religieuse, Paris, Presses Universitaires de France
(4) Des sociétés sans États ? Nous présenterons la distinction entre sociétés à État et sociétés sans État en Afrique pour ensuite étudier le système politique d’une société dite sans État. Cette séance introduira la notion de segmentarité politique et l’étude des relations entre système de parenté et système politique. Elle permettra en conclusion de discuter des conséquences de la colonisation sur les systèmes politiques locaux et de la question de l’État en Afrique.
Fortes Meyer & Evans-Pritchard E-E., 1964 Systèmes politiques africains. Paris: PUF (African Political Systems. London: Oxford University Press, 1940)
(5) La société contre l’État ? Cette séance reprendra l’idée développée par Pierre Clastres de « société contre l’État » à partir de son étude du chef amazonien et des débats qu’elle a suscités. Cette discussion sera l’occasion d’introduire la notion de chamane et de chamanisme. La séance se conclura par des remarques sur la notion de Zomia en Asie du Sud-Est.
Pierre Clastres, 1974, La société contre l’État. Paris, Éditions de Minuit.
Philippe Descola, 1998, « La chefferie amérindienne dans l’anthropologie politique », Revue française de science politique, pp. 38-45.
James C. Scott, 2013, Zomia, ou l’art de ne pas être gouverné, Paris, Seuil (The Art of Not Being Governed. An Anarchist History of Upland Southeast Asia, Yale University Press, 2009)
(6) Big men. Cette séance portera sur les sociétés de Mélanésie où, en l’absence de pouvoir centralisé, l’organisation sociale se structure autour de big men don la position repose sur leur capacité à faire circuler les richesses, à régler les conflits et synchroniser pour un temps une part de la vie sociale autour de lui. Cette séance permettra de discuter la relation entre pouvoir, échanges et violence.
Lemonnier Pierre, 1990, Guerres et festins. Paix, échanges et compétition dans les Highlands de Nouvelle-Guinée. Paris: Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme
Sahlins, Marshall D. 1963, « Poor Man, Rich Man, Big-Man, Chief: Political Types in Melanesia and Polynesia. », Comparative Studies in Society and History, 5(3): 285–303
Coppet, Danel (de), 1970, « Cycles de meurtres et cycles funéraires » in J. Pouillon et P. Maranda (ed) Échanges et Communications, La Hague, Paris : Mouton pp. 759-81
(7) Hiérarchie, égalité et sécularisation du pouvoir. Cette séance sera consacrée à la notion de hiérarchie. Elle sera organisée autour d’une discussion sur les débats autour de l’analyse du système des castes en Inde par les anthropologues. Cette discussion se conclura par une discussion sur la question de l’orientalisme.
Louis Dumont, 1966, Homo Hierarchicus, Le système des castes et ses implications. Paris: Gallimard.
Edward W. Saïd, 1983, L’Orientalisme. L'Orient créé par l'Occident. Paris, Éditions du Seuil (Orientalism, New York, Pantheon Books 1978)
(8) Le don. Cette séance porte la question du rôle des échanges dans la vie sociale à travers l’étude de l’Essai sur le don de Marcel Mauss. Je présenterai brièvement les potlatchs observés il y a plus d’un siècle sur la côte nord-ouest d’Amérique du Nord, ces compétitions à coup de cadeaux qui allaient jusqu’à la destruction des biens offerts. La séance se conclura sur la question de « l’esprit de la chose donnée » (le hau maori), qui a ouvert un champ très riche de recherches sur les frontières entre les personnes et les choses qui se retrouvent dans les recherches sur les relations aux objets et les interfaces hommes-machine.
Marcel Mauss, 1950, « Essai sur le don. Forme et raison de l’échange dans les sociétés archaïques », Sociologie et anthropologie, Paris : PUF, pp. 389-475.
(9) Parenté. Cette séance porte sur l’étude anthropologique de la parenté. Après avoir discuté de la distinction entre nature et culture à travers l’universalité de la prohibition de l’inceste, nous verrons comment, à partir d’approches centrées sur la filiation, la théorie de l’échange de Claude Levi-Strauss opère une révolution copernicienne dans la conception des relations sociales.
Lévi-Strauss, Claude, 1967, Les structures élémentaires de la parenté. Paris, La Haye: Mouton/Maison des sciences de l'Homme (1ère édition, 1949)
(10) Des choses, des hommes et des femmes. Cette séance montrera comment l’étude par Malinowski des échanges Kula en Mélanésie (centrés sur le prestige masculin individuel) au début du XXe siècle avait éclipsé le rôle fondamental des femmes dans la production de la vie sociale de ces sociétés. Elle nous conduira à discuter de l’étude des relations hommes-femmes en anthropologie.
Malinowski Bronislaw, 1989, Les Argonautes du Pacifique occidental, Paris, Gallimard.
Weiner Annette, 1983, La richesse des femmes ou comment l'esprit vient aux hommes, Paris: Seuil (Women of value, men of renown : new perspectives in Trobriand exchange, Austin: University of Texas Press, 1978)
Olivier Allard, 2016 « Parenté », in Genre & sexualité: encyclopédie critique, J. Rennes (ed.), Paris, La Découverte, p. 439-448.
Héritier Françoise , 2007, Masculin-Féminin, 2 vol., Paris, Éditions Odile Jacob.
(11) Homoœeconomicus ? L’économie est-elle une réalité objective et universelle ou une catégorie sociale apparue à un moment donné de l’histoire occidentale ? Cette seconde séance portera sur le statut de l’économie dans les société et la relation entre savoir anthropologique et science économique à propos de l’homoœconomicus et de la monnaie.
Karl Polanyi, 1983, La Grande Transformation, aux origines politiques et économiques de notre temps, Paris: Gallimard (The Great Transformation: The Political and Economic Origins of Our Time, New York : beacon Press, 1944)
Modalités d'évaluation: participation aux discussions et remise d’un travail écrit sous la forme d’une note de lecture sur un thème du cours ou choisi de concert avec l’enseignant ».
Credits ECTS : 2
Diplôme(s) concerné(s)
Parcours de rattachement
Format des notes
Numérique sur 20Littérale/grade réduitPour les étudiants du diplôme Diplôme d'ingénieur de l'Ecole polytechnique
Le rattrapage est autorisé (Note de rattrapage conservée)Le coefficient de l'UE est : 1.5
La note obtenue est classante.