Descriptif
L’homme, la bête, l’animal
Notre perception des animaux a été révolutionnée depuis un siècle. Ils apparaissent enfin avec des subjectivités propres et multiples. La tique n’est pas une machine biochimique mais un vivant qui évalue l’environnement en configurant son espace-temps, l’oiseau ne siffle pas pour assurer sa survie mais chante pour exprimer le territoire, le loup n’est pas une bête féroce mais un grand diplomate... Désormais, les concepts de mécanisme, d’instinct et de sauvagerie sont des obstacles épistémologiques. Mais comment reconnaître l’étrange altérité des animaux ?
Si l’être de l’animal est longtemps resté obscur, cela tient au fait que l’homme s’est compris par opposition à l’animal. L’animalité devait alors désigner la part basse, incontrôlable et amorale, de l’humanité. C’est depuis notre possible bestialité que nous comprenions l’animalité. Or l’animal, en toute rigueur, n’est jamais bestial. Et nos formes d’agressivité, de brutalité et de domination sont typiquement humaines.
Il est maintenant évident qu’en coupant l’homme de la nature pour le constituer en règne, on devait donner le champ libre à tous les abus. Qui veut faire l’ange, fait aussi la bête, disait déjà Pascal au début de la modernité. Inutile de rappeler la vertigineuse disparition des espèces non-humaines ou le traitement monstrueux des animaux à quoi conduit notre industrie alimentaire.
Les enjeux de nos travaux et discussions seront métaphysiques et politiques à la fois : le peu que nous savons de l’homme doit guider ce que nous pouvons faire avec les autres animaux. Il en va de la compréhension de l’exception humaine, cette espèce qui a perdu sa capacité d’adaptation à l’environnement pour se mettre à fabriquer tous les environnements. D’où vient ce singulier rapport au sens, au langage, à l’invisible sinon de notre condition animale ? Mais il en va aussi d’une recomposition politique de nos liens avec les autres vivants, c’est-à-dire d’une politique qui ne serait plus le fait des seuls humains. Nous avons grand besoin d'apprendre des autres vivants ce que c'est qu'habiter.
Il a suffit ces derniers mois que l’activité des hommes ralentisse pour qu’on voit partout les animaux réapparaître, explorer les mondes humains et nous donner le spectacle de leur souveraine nonchalance. Faut-il alors devenir sensible jusqu’à imaginer un monde qui serait indemne de la violence contre l’animal ? Faut-il plutôt inventer des distances, des diplomaties, des alliances entre nos mondes et les leurs ? Jusqu'où parviendrons-nous à entrer dans des devenirs animaux ?
Bibliographie indicative :
Philosophie
René Descartes, Lettre au marquis de Newcastle
Robert Antelme, L’espèce humaine
Giorgio Agamben, L’ouvert : De l’Homme et de l’animal
Vinciane Despret, Penser comme un rat
Caitlin O’Connell, Le parrain –au cœur d’un clan d’éléphants
Baptiste Morizot, Les Diplomates : cohabiter avec les loups sur une autre carte du vivant
Cinéma
Werner Herzog, Grizzly man
Jean-Michel Bertrand, La vallée des loups
Hayao Myazaki, Nausicaä de la vallée de vent
Isao Takahata, Pom Poko
Littérature
Herman Melville, Moby Dick
Jack London, L’appel de la forêt
Franz Kafka, Le terrier/Joséphine, la cantatrice ou le peuple des souris
Modalité d'évaluation :
Ce séminaire doit être conçu comme un laboratoire collectif. Les étudiants auront à présenter un exposé oral qui alimentera nos discussions. L’assiduité sera prise en compte dans l’évaluation.
Langue du cours : Français
Crédits ECTS : 2
effectifs minimal / maximal:
/25Diplôme(s) concerné(s)
Parcours de rattachement
Format des notes
Numérique sur 20Littérale/grade réduitPour les étudiants du diplôme Titre d’Ingénieur diplômé de l’École polytechnique
Le rattrapage est autorisé (Note de rattrapage conservée)- Crédits ECTS acquis : 2 ECTS
La note obtenue rentre dans le calcul de votre GPA.
Pour les étudiants du diplôme Echanges PEI
Le rattrapage est autorisé (Note de rattrapage conservée)- Crédits ECTS acquis : 2 ECTS